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Baddou Zaki. “Les gens ont la mémoire courte”

Source : telquel

zaki flagDans cet entretien, l’ancien gardien de but et coach des Lions de l’Atlas revient sur son parcours, son clash avec Naybet, sa relation avec Hassan II… Confessions d’une icône du football marocain.


Vous venez de boucler cette saison en tant qu’entraîneur du Kawkab de Marrakech (KACM). Quel bilan en faites-vous ?


Le bilan est très positif. Nos objectifs ont été atteints, voire dépassés. L’équipe a non seulement pu se maintenir parmi l’élite, mais elle a également terminé la saison à un classement plus qu’honorable. Le KACM, qui était menacé de relégation, a aujourd’hui retrouvé un peu de sa gloire, et les Marrakchis en sont redevenus fiers. Nous allons donc poursuivre sur cette lancée en visant, pour la prochaine saison, un meilleur classement et, pourquoi pas, le titre.


Entre votre démission du poste de sélectionneur de l’équipe nationale et la prise de vos fonctions au KACM, vous aviez pratiquement disparu de la circulation…


J’ai tout simplement voulu faire un break, pour passer davantage de temps avec ma famille. J’ai eu ensuite quelques contacts pour m’occuper de l’équipe du Sénégal et celle de la Libye, puis du Moghreb de Tétouan, mais ils n’ont pas abouti.


Il y a des rumeurs quant à votre possible retour à la tête des Lions de l’Atlas. Est-ce que vous avez été vraiment approché dans ce sens ?


Rien de tout cela n’est vrai. Ce sont, comme vous le dites, de simples rumeurs sans fondement. Je le répète encore une fois, pour moi, cette page est bel et bien tournée.


Cela veut dire que vous avez définitivement fermé la porte à l’équipe nationale ?


Ce n’est pas non plus ce que j’ai dit. Aujourd’hui, l’équipe nationale est dirigée par un monsieur qui s’appelle Mhammed Fakhir, qui a un contrat en bonne et due forme avec la Fédération, et à qui je souhaite, au passage, beaucoup de réussite. Quant à moi, je suis le coach du Kawkab de Marrakech pour au moins une année supplémentaire.


zaki hayatouAvec le recul, qu’est-ce qui manquait ce jour-là aux Marocains, face aux Tunisiens, pour se qualifier au Mondial allemand ?


Ce point qui nous manquait, je le dis haut et fort, nous l’avons perdu en dehors du terrain. Il y a d’abord nos adversaires tunisiens qui, semble-t-il, n’ont pas été très transparents. Je vous rappelle qu’à l’époque, le ministre kenyan des Sports avait même demandé l’ouverture d’une enquête pour corruption, relative aux matchs opposant son équipe à celle de la Tunisie.


Il y a eu aussi les conditions désastreuses dans lesquelles nous nous sommes préparés. Je pense entre autres à l’affaire Naybet qui nous a tous déconcentrés et qui a été très mal gérée par nos responsables. Regardez, par contre, comment les Egyptiens ont réglé le cas de leur joueur-vedette Mido, lors de la dernière CAN. Ce dernier, qui avait dépassé les bornes, avait été très vite suspendu par sa fédération. Ce qui n’a pas empêché l’Egypte de remporter le titre africain.


Vous persistez donc à dire que vous n’avez rien à vous reprocher dans l’affaire Naybet ?


Parfaitement. S’il y a un responsable, c’est bien lui. Il ne s’est pas comporté comme un professionnel. J’assume pleinement mes choix. Non seulement toute l’équipe a été déconcentrée par sa faute, mais sa réputation et sa crédibilité en ont pris un sacré coup. Je trouve que son attitude n’était pas digne du grand Naybet qui a tant donné à l’équipe nationale et dont j’étais le premier fan.


Revenons à vos débuts dans le football. Votre arrivée au WAC se serait faite dans la douleur…


Tout à fait. J’avais à peine 18 ans quant le WAC s’est intéressé à moi. Pour ma mère, il était hors de question que j’abandonne mes études et que je quitte Salé où nous étions installés. Il a fallu que les dirigeants wydadis insistent et qu’un de mes oncles qui habite Casablanca se porte garant pour qu’elle change d’avis.


Il se dit même qu’une fois à Casablanca, vous n’arriviez même pas à trouver votre chemin pour vous rendre au complexe du WAC…


(Rires). Ce n’est pas exactement le cas. J’habitais alors chez mon oncle à Aïn Sebaâ et il est vrai que je ne connaissais pas la ville. Pour me rendre aux entraînements, j’avais trouvé la parade : je suivais en mobylette un premier bus, puis un deuxième. Et au retour, c’était le même manège. C’était pour moi le seul moyen de m’y retrouver. Le plus drôle, c’est qu’il m’arrivait d’attendre les bus de longues minutes, parfois sous la pluie. Mais le plus difficile, c’était de gérer une autre forme de pression, encore plus importante : côtoyer sur le terrain, à mon âge, des joueurs de la trempe de Shaïta ou Lechheb.


Vous vous êtes vite retrouvé dans les cages de l’équipe nationale, quelques mois avant la fameuse déculottée contre l’Algérie, en 1979 (1-5 à l’aller et 0-3 au retour). Comment expliquez-vous ces résultats aujourd’hui ?


Une quinzaine de jours avant le premier match à Casablanca, nos responsables ont décidé de changer toute l’équipe, qui était alors composée uniquement de jeunes, pour faire appel aux anciens. Ils se sont sûrement dit que nous n’étions pas prêts à faire face à la pression qu’il y avait autour de ce match. Je crois que c’est ce chamboulement de dernière minute qui nous a valu une aussi large défaite. Pour ce qui est du match retour, on a assisté de nouveau à un changement, et ce sont cette fois-ci les jeunes qui étaient appelés à défendre les couleurs nationales. Et malgré la défaite, nous nous étions bien défendus. D’ailleurs, à notre retour, Hassan II nous avait reçu pour nous féliciter.


À propos de Hassan II, on vous disait très proche de lui. Certains affirment même que vous étiez son préféré ?


Son préféré ? Je ne sais pas. Mais il est vrai que Hassan II avait beaucoup d’affection pour moi. C’est d’ailleurs lui qui a choisi le prénom de mon premier enfant… qui est le même que celui d’une de ses filles.


Que vous racontait-il quand il vous avait au téléphone, durant votre participation à la Coupe du monde de 1986 ?


Après notre victoire contre le Portugal, par exemple, il m’a retenu plus d’une heure au téléphone, tellement il était content. Sur le coup, je n’arrivais même pas à entendre ce qu’il me disait, tellement j’étais nerveux. D’ailleurs je n’ai jamais autant transpiré de toute ma vie, même sur un terrain (Rires).


Et après l’élimination contre l’Allemagne en huitièmes de finale, que vous a-t-il dit ?


Il m’a une nouvelle fois félicité. Il en a profité pour me conseiller de faire très attention aux clauses du contrat que j’étais sur le point de signer avec l’équipe du RCD Majorque. Il me disait qu’il comptait sur moi pour devenir son meilleur ambassadeur en Espagne.


Plus de vingt ans plus tard, que représente pour vous cette participation à cette Coupe du monde ?


Vous savez, il y a eu tellement de choses qui ont fait que Mexico 86 reste pour moi, aujourd’hui encore, quelque chose de merveilleux. C’est durant ce Mondial que j’ai eu mon premier enfant, que j’ai signé mon premier contrat professionnel. Et bien sûr, il y a cette fierté d’avoir participé à ce grand moment du ballon rond et d’avoir gardé les buts de la première équipe africaine à passer le premier tour.


Le Maroc aurait peut-être pu aller plus loin, si vous aviez arrêté ce coup franc de Matthäus ?


J’aurai pu arrêter ce coup franc si mon mur était bien placé. Devant de grandes équipes comme l’Allemagne, lorsque vous faites une erreur pareille, il ne vous reste plus qu’à aller chercher le ballon au fond des filets. Mais bon, même si j’avais réussi à attraper ce ballon, il n’est pas sûr pour autant qu’on se serait qualifiés. Les Allemands étaient ce jour-là beaucoup plus forts que nous, il ne faut pas avoir honte de le dire. Mais nous n’avons rien à regretter. Nous avons quand même réussi un bel exploit : passer au second tour, c’était quand même pas mal.


Depuis, la sélection marocaine n’a plus retrouvé le même niveau de qualité ni de popularité…


Je ne suis pas d’accord. Au risque d’en surprendre plus d’un, je dirais que l’équipe qui est arrivée en finale de la CAN 2004 était largement supérieure à celle de 1986. Composée uniquement de jeunes, il ne faut pas l’oublier, cette équipe a réussi à faire sortir dans les rues des millions de Marocains. Ce n’est quand même pas rien. Il y a eu autour d’elle un engouement sans précédent de la part du public, des médias, des sponsors… J’ai l’impression que les gens ont parfois la mémoire courte et, surtout, très sélective.


Carrière. De Sidi Kacem à Majorque


Installé avec sa famille à Salé, où il garde les buts des locaux, ce natif de Sidi Kacem (le 2 avril 1959) tape très vite dans l’œil des recruteurs du Wydad de Casablanca. Ces derniers font des mains et des pieds pour le recruter, quitte à se rendre auprès de sa mère pour la convaincre de laisser partir son “petit”. Âgé de 18 ans à peine, il se retrouve donc à côtoyer des joueurs de grand calibre qui constituaient alors le WAC de la belle époque. Un an plus tard, c’est la sélection nationale qui lui tend les bras.


Avec les Rouge et Blanc, il enchaîne les trophées : deux titres de champion (1978 et 1986), deux Coupes du Trône (1979 et 1981) et une coupe Mohamed V (1979). Avec la sélection nationale, il brillera de mille feux, sans pour autant remporter le moindre titre. Sa brillante prestation au Mondial 1986 lui vaudra le titre de Ballon d’or africain et lui permettra d’entamer une carrière professionnelle au RCD Majorque (1986 - 1990). Dans la ville espagnole, il est adulé par le public, qui va jusqu’à… ériger une statue à son effigie. Avec son nouveau club, il fut finaliste de la Coupe d’Espagne en 1991 et sacré meilleur gardien de la Liga deux années de suite (1989-1990).


Zaki finira son parcours de gardien de but au FUS, pour bifurquer vers une carrière d’entraîneur, toujours au Fath. Il prendra ensuite successivement les rênes du Wydad de Casablanca, du Sporting de Salé, du Chabab de Mohammedia, avant de revenir au WAC, avec lequel il remporte une Coupe du Trône en 1998 et joue une finale de la Coupe d’Afrique des clubs champions l’année suivante. Il enchaîne avec le KACM et le MAS, avant d’être nommé en 2002 sélectionneur des Lions de l’Atlas. Avec les succès, mais aussi les échecs, que l’on connaît...

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