Star précoce, joueur maudit, Jaouad Zaïri dispute cette semaine le 2ème tour de la Ligue des Champions. Un miracle pour un footballeurque l'on croyait perdu depuis la CAN 2004.
Les fans de Jaouad Zaïri poussent un ouf de soulagement. Ils ont enfin retrouvé, depuis le début de la saison 2009-2010, leur attaquant préféré : le fin et élégant Jaouad Zaïri. Rappelé depuis peu en équipe nationale, le "dribbleur fou", comme le surnomment les médias français, est une des pièces maîtresses de son nouveau club, les Grecs de l'Olympiakos. En septembre dernier, il a crevé l'écran pour ses débuts en Champions League : c'était face aux Hollandais de l'AZ 67 Al Alkmaar (1-0) d'un autre Marocain, Mounir El Hamdaoui. Grâce à lui, l'Olympiakos a réussi l'exploit de se qualifier pour le 2ème tour de la même Champions League qui démarre la semaine prochaine avec un choc inédit : Olympiakos-Bordeaux. Autrement dit, Jaouad Zaïri contre Marouane Chamakh, les deux seuls Marocains "survivants" à ce niveau.
Un produit de Taza
Flash-back. L'histoire de Zaïri commence en 1982 à Douar Jlala, dans la région de Taza. Deux ans plus tard, la famille Zaïri débarque à Macon en France. Dans la petite ville de Bourgogne, le petit Jaouad taquine la balle et développe une qualité qui deviendra sa marque de fabrique, son péché mignon : le dribble. "Alors qu'il n'avait qu'une dizaine d'années, il dribblait déjà comme un fou. On aurait dit qu'il était né avec un ballon collé au pied", se souvient ce proche. "Dribbler, chez moi c'est quelque chose de naturel, explique pour sa part notre as du dribble à Maxifoot.fr. "Je ne travaille pas vraiment cela. Ça vient tout seul. Depuis l'époque où j'étais gamin, quand on jouait dans la rue. C'est peut-être le manque de place, à l'époque, qui m'a forcé à jouer comme ça". Conscient de son potentiel et encouragé par son entourage, Jaouad Zaïri n'a qu'une idée en tête : faire du football son métier. A 16 ans, il est recruté par un club professionnel, le FC Gueugnon, pensionnaire de la ligue 2 française. C'était parti.
L'envol définitif a lieu à Sochaux, club de l'élite française, que Jaouad rejoint en 2001. Quatre saisons et une cinquantaine d'apparitions : c'est à la fois beaucoup et peu. Son entraîneur de l'époque, Guy Lacombe, trouve qu'il est "un des joueurs les plus talentueux de son effectif", mais il lui reproche "de trop jouer pour lui-même et non pour le groupe". Heureusement qu'il y a l'équipe nationale. Lors de la CAN 2004, le Lion de l'Atlas va démontrer toute l'étendue de son talent. "Si Jaouad a explosé lors de cette Coupe d'Afrique des Nations, c'est parce que le coach Baddou Zaki l'a mis en confiance", explique son agent, Mounir El Hassouni. Il a suffi d'une seule compétition, cette CAN que le Maroc a failli gagner (finale perdue contre le pays hôte, la Tunisie), pour faire de Zaïri la nouvelle coqueluche du football marocain. Plus fort, plus adulé que Chamakh lui-même. "C'était de la folie, se remémore un de ses proches. Du jour au lendemain les sponsors ont commencé à se l'arracher. Dans la rue les gens portaient des maillots estampillés Zaïri, les commerçants affichaient des posters à son effigie, les filles lui couraient après". Une star est née
De retour à Sochaux avec un gros capital confiance sous la semelle, Jaouad Zaïri retrouve grâce aux yeux de son coach qui fait davantage appel à lui sur le terrain. De son côté, l'international marocain a promis de faire des concessions : "J'ai commencé à jouer plus collectivement. Je dribblais toujours mais, quand il fallait passer ou centrer, je n'hésitais plus à le faire". Mais l'idylle est de courte durée. En 2005, Guy Lacombe jette l'éponge suite à une mésentente avec son président, Jean-Claude Plessis. Entre le nouveau coach Dominique Bijotat et Jaouad Zaïri, le torchon brûle. "Quelques semaines après l'arrivée de Bijotat, Jaouad a eu la maladresse de déclarer publiquement qu'il regrettait Lacombe. Ça l'a perdu ", raconte Mounir El Hassouni. Blacklisté par son nouveau coach, Jaouad Zaïri n'a plus qu'une idée en tête : partir.
La galère du remplaçant
Plusieurs clubs dont Lyon, le Paris Saint-Germain ou la Lazio de Rome le suivent de près, s'apprêtant à le superviser lors de la CAN 2006 en Egypte. Mais Zaïri se blesse et ne prend pas part au rendez-vous africain. Le jeune prodige se retrouve sans club et se tourne vers les Saoudiens de l'Ittihad de Jeddah : "Je voulais quitter Sochaux à tout prix. Je n'avais pas le temps de réfléchir puisque le mercato était sur le point de se clôturer". L'expérience saoudienne est pleine de surprises, plutôt désagréables. Quelques semaines à peine après son arrivée au pays des pétrodollars, Zaïri découvre que le chèque de 800T000 euros qu'il a reçu des mains de ses recruteurs est sans provision. Et, ce qui n'arrange rien, il joue peu et ne prouve rien sur le terrain. Il décide finalement de quitter le pays et dépose plainte auprès du Tribunal arbitral du sport à Lausanne. Qui lui donnera gain de cause un an plus tard.
Zaïri se retrouve sans club pendant six mois avant de rejoindre, fin 2006, le Boavista Porto au Portugal, ensuite le FC Nantes en France. Là non plus, le succès n'est pas au rendez-vous. Pourquoi cette succession d'échecs ? "S'il n'a pas joué dans ces deux derniers clubs, il faut peut-être se poser des questions", confie alors Jean Claude Plessis, son ancien président à Sochaux, à un journaliste français. "C'était un joueur sérieux et charmant jusqu'au jour où il a rencontré Dieu. Car pour lui, Dieu peut remplacer un entraînement ou un match " poursuit-il. "Depuis 2005, la religion a pris beaucoup de place dans sa vie, ce qui agaçait forcément ses entraîneurs et ses dirigeants", commente pour sa part le journaliste sportif. Réaction de son agent Mounir El Hassouni : "Ce n'est pas parce que Jaouad est croyant, timide et réservé qu'on va le traiter d'intégriste, il faut arrêter avec ça". Interrogé à ce sujet, Jaouad Zaïri tranche simplement : "Pour moi, les médias ont accordé beaucoup d'importance à une histoire (ndlr, la religion) qui ne le méritait pas".
Ce n'est qu'en 2007 que Jaouad Zaïri voit le bout du tunnel. Un expatrié marocain, Khalid Karama, directeur sportif d'un petit club en Grèce, l'Asteras Tripolis, lui propose une "pige" dans le pays d'Apollon. Joauad saisit sa chance. Il joue, et plutôt bien, au point de se faire remarquer par le premier club grec : Olympiakos le Pirée, qu'il rejoint en 2009. La suite ? Un championnat local mené tambour battant (Olympiakos joue pour le titre) et, surtout, un excellent parcours en Ligue des Champions. A 27 ans, c'est sûr, le Lion de l'Atlas est bien parti pour rattraper le temps perdu.
Source : telquel
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