La polémique concernant les joueurs qui se blessent en équipe nationale, symbolisée par l'affaire Oulmers, a nettement crispé ces dernières semaines les rapports entre la Fédération internationale de football (FIFA) et les clubs, surtout les plus puissants.
Assignée devant la justice belge par le Sporting de Charleroi, la FIFA montre des signes d'inquiétude, à l'image de son président Sepp Blatter qui craint »un péril pour le football mondial».
Le club de 1re division belge réclame à la Fédération internationale un dédommagement (1,25 millions d'euros) après la blessure de son milieu de terrain marocain Abdelmajid Oulmers avec son équipe nationale le 17 novembre 2004.
L'enjeu est de taille et dépasse largement le cas particulier d'Oulmers qui n'a pu jouer pendant huit mois tout en continuant à être payé par Charleroi. Le G14, association de 18 clubs parmi les plus puissants d'Europe, a d'ailleurs décidé de soutenir Charleroi et sera partie prenante au procès.
Si le tribunal du commerce de Charleroi - qui pourrait interroger la Cour européenne de justice à Luxembourg - devait donner raison au club, sa décision pourrait faire jurisprudence et remettre en cause plusieurs articles du règlement de la FIFA qui, selon le club, »constituent un abus de position dominante».
La fin des équipes nationales ?
Dans la situation actuelle, selon les articles 36 à 40 du règlement de la FIFA, un club, même contre sa volonté, est obligé de libérer un joueur international. L'article 37 stipule que le club mettant son joueur à disposition n'a droit à aucune indemnité financière et qu'il est seul responsable pour la prise des polices d'assurance.
Les clubs s'estiment donc doublement pénalisés lorsque les joueurs reviennent blessés: en plus d'être privés du joueur, ils doivent continuer à lui verser son salaire et financer sa rééducation.
»La FIFA abuse de sa position en organisant des matches avec des joueurs payés par d'autres», se plaint le G14.
Le cas d'Oulmers pourrait faire des émules. Ces derniers jours le Français Eric Abidal et le Néerlandais Mark Van Bommel se sont gravement blessés en sélection. Leurs clubs respectifs, Lyon (1re div. française) et le FC Barcelone (1re div. espagnole), étudient actuellement la possibilité d'une action en justice.
»Exiger des fédérations qu'elles versent des indemnités aux clubs, ce serait la fin des équipes nationales et des tournois comme la Coupe du monde», déclarait la semaine dernière Marco Van Basten, le sélectionneur de l'équipe des Pays-Bas interrogé après la blessure de Van Bommel.
Bataille juridique
Comme Van Basten, Blatter estime que »l'action de Charleroi met en danger l'ensemble du football mondial», les petites fédérations n'ayant sans doute pas les moyens financiers d'indemniser les clubs. Certains au sein du G14 réclament 5000 euros par jour et par joueur mis à disposition.
Les plaidoiries dans l'affaire Oulmers ont été fixées au 20 mars 2006 par le tribunal de Charleroi qui devrait en principe rendre son ordonnance en juin ou juillet prochain.
Mais l'avocat de Charleroi, M. Jean-Pierre Deprez, s'attend à une longue bataille juridique.
»La FIFA va sans doute se lancer dans un combat d'arrière-garde, dans des démarches de procédures qui ne concernent pas le fond du problème», a-t-il expliqué à l'AFP.
Dix ans après l'arrêt Bosman, du nom du footballeur belge, rendu le 15 décembre 1995 par la Cour européenne de justice et qui avait libéralisé le système des transferts des joueurs en fin de contrat, le monde du football s'apprête peut-être à connaître une nouvelle révolution.
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