«J'ai honte car on était 11 contre 10 et on n'a pas joué au football. Il y avait une équipe qui a lutté mais cela n'explique pas tout. » Henri Stambouli ne trouvait pas de mots aussi durs pour jeter l'anathème sur ses joueurs à qui il impute cette élimination de la dernière chance, la chance de voir les militaires éviter de sortir les mains vides au terme d'une saison aride après trois années de gloire sous la houlette de Mhammed Fakhir.
Le coach français aura finalement reconnu que son équipe n'était pas suffisamment compétitive comme nous ne cessions de le souligner depuis quelques temps. L'absence de quatre éléments clés contre le Sfax ne pouvait expliquer la déroute, comme nous l'accorde Stambouli. Les accusations proférées par celui-ci sous-entendaient que ses poulains avaient tout simplement levé le pied. Grave accusation, surtout qu'il s'agit d'un team au statut particulier, qui représente tout un pays et non la seule ville de Rabat. Stambouli menace que la réunion d'aujourd'hui lundi sera chaude et devra se solder par une mise au point on ne peut plus sévère. « Après une série vertueuse durant trois ans, il est temps de se remettre en question. Ceux qui n'ont plus envie de jouer devront partir. »
Stambouli aura-t-il soulagé ainsi sa conscience ? Pas totalement à notre humble avis car il a une part de responsabilité dans cette perte de vitesse de l'ogre d'hier devenu un groupe quelconque et surtout indiscipliné. La présence de l'entraîneur n'est pas très visible, bien au contraire ! Sur le banc de touche, il y a autant d'entraîneurs que d'accompagnateurs. Le public marocain en a été témoin lors du match « aller » et également au match «retour». Nous écrivions sur ces mêmes colonnes que Stambouli a trop lâché les brides. La conséquence a été le ratage d'une qualification qui aurait été scellée à Sfax sans l'expulsion stupide du meneur de jeu, Ajeddou.
Aujourd'hui, les joueurs n'ont que les yeux pour pleurer une saison jouée pour rien. Certains expliquent que les joueurs n'ont pas le moral en raison du non-
recouvrement de leurs arriérés de deux mois de salaires.
Bref, l'ambiance au sein de l'équipe militaire n'est pas propice à la performance et la preuve a été donnée encore une fois samedi dernier contre une équipe tunisienne qui n'était pas pourtant un foudre de guerre. Ils ont misé sur une tactique adéquate par rapport à l'adversaire, comme l'explique leur coach, De Castel : «On n'a pas reculé et on a gardé le même système de jeu. » Ce système s'appuyait sur des contres tranchants qui pouvaient donner le but à tout moment face à une défense gruyère qui a énormément souffert de l'absence de son maestro, Lahcen Ouchla en l'occurrence.
Et pourtant les Marocains donnèrent l'illusion de ne faire de ce match qu'une simple formalité tant ils dominèrent les premières minutes, ratant la concrétisation déjà à la troisième. Ils devaient sceller définitivement le match pour gagner le billet du passage au tour suivant. Ils n'avaient pas par ailleurs le droit à l'erreur devant 15.000 fans qui aiment autant qu'ils flagellent. Après 15 mn de jeu, on constatait déjà que la mission n'était pas de tout repos face à un adversaire super calme, quadrillant admirablement le terrain.
Un team très expérimenté, recelant des internationaux de bon calibre. Au gré du temps, les militaires semblaient à court de solutions, à l'image de Stambouli cloué sur le banc, la joue reposant dans la paume de la main. Pendant qu'il rêvait, son homologue s'agitait, fouettait son attelage, prodiguant conseils et ordres. La ligne d'attaque, déjà chichement servie, est mise sous l'éteignoir d'une défense athlétique tunisienne conduite par Hadj Messaoud.
La ligne médiane sombrait dans la précipitation, développant un jeu débridé et forcément stérile. La providence eut finalement pitié des militaires qui se retrouvèrent en supériorité numérique après l'expulsion de Mchargui, auteur d'une agression contre Boubou. A quelque chose malheur est bon, dit-on.
Cette « injustice » arbitrale stimula les Tunisiens qui sortirent de leur cocon et se lancèrent résolument à l'attaque. La fébrilité douteuse des nôtres tomba dans toute sa nudité. Les Marocains étaient contraints de se replier, de se livrer à une débauche d'énergie dans la tentative d'endiguer la furia d'un vis-à-vis voyant rouge. Le petit jeu de Kaddioui, la nonchalance de Abdessadeq traînant des boulets de plomb, le jeu débridé des médians, le manque de cohésion de la défense, n'étaient pas de nature à rassurer les gradins.
Un silence de cimetière s'y installa à la 35e, suite à une action chaude dans le rectangle de Jermouni. Puis, c'est Nafti qui vit son tir sur balle arrêtée frôler la cage marocaine (40e). Il a fallu un coup de rein de Bahri qui effectua un long slalom, se présenta devant le gardien, tira mais le ballon fut dévié par le poteau. Cette action sauva un premier half catastrophique (45e).
Les FAR avaient 15 minutes pour méditer sur la solution idoine. Mais en vain. Les Tunisiens abordèrent la seconde manche avec la même détermination. Ils finirent par cueillir le fruit de leur labeur à la 59e mn. Ce fut à la suite d'un contre sur la droite et un centre qui trouva dans sa trajectoire la tête d'O. King et ce fut le but. Le match était plié en fait car on imaginait mal les FAR capables de renverser la vapeur. Les remplacements effectués par Stambouli n'auront aucun effet sur le rendement de son équipe qui demeurait au contraire sous la menace. Le public perdit son sang froid, prit à partie le coach militaire. Plus encore, il se porta aux côtés des… Tunisiens ! Le public retrouva ainsi ses anciennes manières pour témoigner de sa déception.
L'effet d'une telle animosité eut son effet sur le comportement des joueurs, gagnés par la nervosité. Sans cela, Ouaddouch aurait certainement converti la seule action franche qu'il s'est offert depuis le début du match (70e).
C'était la dernière cartouche tirée en l'air. Et quand Stambouli a décidé enfin de remplacer Abdessadeq qui errait depuis le coup d'envoi, il incorpora un… défenseur, Fadli, mais qu'il plaça de surcroît en attaque. Un rôle que ce joueur n'a plus assumé depuis l'arrivée de Fakhir. Le public ne pouvait s'y tromper.
Il faudrait un miracle pour que son favori puisse espérer niveler le score.
Le miracle ne se produira pas. Le coup de sifflet final retentit subitement. Stambouli balança nerveusement son bras en l'air et se dirigea à pas vifs vers les vestiaires, le regard fixant au sol.
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