Un spectacle émouvant, pathétique, de joueurs en sanglots sur le gazon, consolés par le staff technique, lui-même les larmes aux yeux, voulant à mort à l'arbitre qui aurait prolongé le match de 30 malheureuses secondes au terme desquelles il a accordé une faute présumée imaginaire, qui se révéla fatale pour un groupe qui a sué toute l'année pour se voir ainsi coiffé au poteau. Fatale également pour l'entraîneur Mhamed Fakhir qui frôla le record de réalisations de trois titres de champion d'affilée.
L'arbitre avait-il vraiment privé les FAR de la victoire ? Les Militaires ne doivent s'en prendre en fait qu'à eux-mêmes. Ils ont encore une fois de plus péché par excès de confiance et de réalisme devant un adversaire qui, assuré du maintien, a joué la majeure partie du match sur les pointes faisant presque de la pure figuration. Il fut tellement effacé au point de délier les mauvaises langues sur les gradins et même dans la tribune d'honneur. Pour leur part, les Militaires étaient tellement sûrs de l'apothéose qu'ils convièrent leurs supporters au match … gratuitement.
Plus de 20.000 fans étaient au rendez-vous pour savourer un bonheur attendu depuis près de 20 ans. Pour éviter de gâcher la fête, la sécurité était si sévère que même les journalistes se sont vu refuser l'accès de leurs voitures. Un cheveu sur la soupe mais qui reste somme toute compréhensible en ces temps qui courent. Les FAR arborèrent leur tenue fétiche, le blanc et Mhamed Fakhir portaient le même survêtement. Une réception somptueuse devait avoir lieu au salon d'honneur. Bref, toutes les dispositions pour fêter ce grand évènement étaient là, au détail près. Il ne restait plus que le résultat.
Les joueurs se pressèrent de le réaliser. Ils se ruèrent d'emblée en attaque, ratant au passage deux occasions (3 et 6e) avant que Kaddioui ne glisse le ballon du salut à Zerouali dont la pichenette atterrit dans la cage marrakchie, provoquant le délire sur les gradins et sur le banc de touche. Les Militaires garderont leur option offensive, manœuvrant au rythme des " Ola " de leur galerie.
Le gardien Benhannoun, l'homme du match, demeurait le seul handicap devant les attaquants locaux qui finirent par lâcher prise en raison de la baisse de régime d'une ligne médiane moins performante que par le passé récent. Les FAR axèrent leurs incursions par le flanc droit mais butèrent sur une défense regroupée et alerte. Il a fallu attendre la 43e mn avant que le gardien kawkabi ne soit menacé par une reprise de Mokhtari.
Du retour des vestiaires, on s'attendait à un ras de marée des locaux. Il n'en sera rien. Kaddioui dilapida lamentablement une occasion de but. Qu'à cela ne tienne, semblaient signifier les gestes de ses coéquipiers. Ils sont tellement dominateurs qu'ils vont bientôt arroser la cage adverse. Un souhait chimérique en fait car la réalité sera toute autre, plus cruelle. Endormis par le KACM faisant le mort, les Militaires débrayèrent, versant dans un jeu démonstratif, pour plaire à la galerie. Plus de 25 mn d'exhibition avant que Kaddioui n'ajoute le second but libérateur.
Le titre était dans la poche. On se congratule. Le gardien Benhannoun sauva le ballon du 3e but. On en a ri, mais le KACM commençait déjà à sortir de sa réserve, plaçant des contres tranchants. A la 76e mn, il parvint à réduire l'écart par le biais de Akkad qui convertit de la tête le corner botté par Adil Lotfi. Les gradins n'y prêtèrent pas attention. Ils continuèrent de chanter victoire. Les joueurs non plus ne semblèrent point inquiétés. Seul Mhamed Fakhir et Saâd Dahane étaient agités, prodiguant des conseils incessants.
Pressentiment de l'écueil éminent ? Sans doute. En tout cas, le but sécurisant tardait à venir et était même peu évident tant les Marrakchis semblaient plus frais, après plus d'une heure de repos dans leur zone. Le gardien Benhannoun demeurait également un handicap supplémentaire.
Il effaça de nouveau le but tout fait devant Ajedou (80e). La première alerte bahjaouie est signée Ait Mbarek qui a relevé Adil Lotfi. Son " heading " a donné des frayeurs. Et puis, c'est la stupeur générale. Une faute à l'orée de la surface de réparation est bottée par Belamine. Elle sera renvoyée dans le paquet, de la tête par (devinez) le gardien … Benhannoun, monté à l'occasion. Dans le cafouillage, le ballon atterrit devant Ait Mbarek qui tire sans discernement pour voir le cuir logé dans les filets.
Le temps sembla s'arrêter pendant un moment au complexe. On n'entendait plus que les cris de jubilation des joueurs visiteurs. On joua une poignée de secondes avant que M. Maâzouz ne siffle la fin de la partie. Debout, le public ne réalisait point ce qui lui arrivait, bouche-bée, le visage hagard. Abattus, les joueurs s'effondrèrent sur l'herbe, pleurant leur mauvaise fortune, poignardés par la destinée, eux qui, au début de la saison, espéraient occuper une place parmi les cinq premiers.
Ils ont été emportés par le succès jusqu'à s'imposer comme le prétendant légitime pour le sacre. Le sort s'y est opposé donc aux dernières secondes de la saison. C'est ça le football. Le Raja avait vécu la même déception la saison précédente par la faute d'un trouble-fête qui s'appelait : KACM.
Brahim Oubel
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