Après avoir parcouru 14 villes marocaines à la recherche des futurs talents du football, Al Qadam Addahabi se déplace pour la première fois à l'étranger. Récit d'une belle aventure qui continue.
On se croirait un jour d'été à Casablanca. Il fait beau, il fait même très chaud et pourtant, la journée ne fait que commencer. Devant la porte du club de football situé à une dizaine de minutes du centre ville, des dizaines de familles, parfois au complet, devisent, s'interpellent, donnent les dernières recommandations à leurs enfants ou font tout simplement connaissance. Là, on se croirait plutôt à Tanger ou à Nador tellement l'accent du nord est dominant. Les jeunes, eux, se regroupent par affinité. Certains se connaissent, d'autres ont l'air perdus et, à les voir discuter entre eux, on a l'impression d'être sur une plage de Bouznika devant de jeunes beurs en train de faire des plans pour la soirée. Nous sommes à Bruxelles. Capitale Européenne. La ville choisie par Al Qadam Addahabi pour son premier casting à l'extérieur du Maroc. La plupart des familles qui sont venues habitent la Belgique, mais d'autres (une cinquantaine) viennent de France, d'Espagne, des Pays-Bas, d'Allemagne et même du Danemark. Elles sont ici pour permettre à leurs fils d'avoir une chance de se qualifier pour la grande finale, mais elles sont également venues parce que les caméras de la TVM se sont déplacées et, comme la nostalgie est parfois très pesante, un petit coucou cathodique à la famille vaut mieux que rien.
Des gabarit de champions
Samedi, 28 mai, 08h45, vingt-huit degrés à l'ombre. L'équipe d'Al Qadam Addahabi arrive. Moment de soulagement pour certains jeunes et leurs parents qui sont là depuis l'aube. Certains ont passé la nuit dans leur voiture devant la porte du stade. Le temps de dresser deux petites tables pour vérifier les inscriptions et les 375 jeunes sont confiés aux soins de Timoumi (toujours aussi passionnant et passionné) et de Abdelhak Filahi, un Marocain de Belgique diplômé d'un centre de formation des entraîneurs et qui vient de rejoindre le staff d'Al Qadam pour les prochaines éditions. « Le déplacement d'Al Qadam en Belgique, reconnaît Othman Benabdeljelil, producteur de l'émission, n'a été possible que grâce à Abdelhak ». Trois semaines auparavant, alors que l'équipe sortait à peine du casting national, l'étape Bruxelles n'était même pas envisagée. C'est une rencontre à Casa - fruit du hasard - entre Benabdeljelil et Filahi qui va tout chambouler. « Je connaissais bien entendu Al Qadam, et lorsque j'ai rencontré son producteur, on a décidé, chacun de son côté de monter l'opération », dira Abdelhak. Côté Marocain, il fallait monter un nouveau dossier, trouver les fonds nécessaires, mettre à la disposition des candidats un numéro d'appel pour les inscriptions et obtenir en un temps record des visas pour 16 personnes. Côté Belge, toute une logistique à mettre en place : hébergement, terrain, transport… le tout, encore une fois, en moins de trois semaines.
Rabiî El Amri a 15 ans. Originaire de Rabat, il habite depuis plusieurs années à Alicante en Espagne.
Parti le mercredi à 06h00 du matin à bord d'un bus, il arrivera à Bruxelles le lendemain. « S'il n'y avait pas un ami à moi qui avait passé un coup de fil à un de ses copains à Bruxelles, je ne serais jamais venu. C'est ce dernier qui m'héberge jusqu'à la fin des qualifications et je ne sais pas comment le remercier… ». Rabiî n'est pas le seul à avoir eu recours au système D. Kamel Guerdouzi de Paris, Issam Dahlim de Marbella, Nizar Yacoubi d'Amsterdam, Hamza Chafni de Düsseldorf et beaucoup d'autres participent à cette aventure avec très peu de moyens et l'espoir de vivre l'aventure casablancaise. Sur le terrain, Timoumi analyse, note les erreurs, décèle les performances et c'est à lui qu'incombe aujourd'hui la responsabilité des qualifications, Hammadi Hmidouch, entraîneur de l'IRT et Abderrahim Taleb (El Jadida), tous deux membres du jury, étant absents pour cause de matchs de championnat cruciaux. Les matchs se succèdent, la chaleur est torride, mais tout le monde y croit.
A l'issue de cette première journée, le constat est unanime : Les jeunes de l'étranger ont une condition physique supérieure à ceux du Maroc. « Impressionnant ! », reconnaît Timoumi. « Autant les jeunes du Maroc ont une technique plus développée, autant ici la condition physique frôle le professionnalisme ». Le plus impressionné sera Ramzi, co-producteur d'Al Qadam : « Je vois des gaillards poilus de partout qui me dépassent d'une tête, et lorsque je leur demande leur âge, ils me répondent 15 ans ! ! ! ».
375 candidats et… 9 élus
Dimanche 29. Le temps est maussade et le ciel est menaçant. Normal, on est en Belgique, pays où en moins de 24 heures, on peut avoir droit aux quatre saisons. Au stade, les familles sont moins nombreuses, la plupart étant rentrées chez elles à l'issue des premières qualifications. Le temps passe. La journée est consacrée aux performances techniques et à la condition physique. Pour les tests et les exercices, il n'y a pas de secret : ce sont les mêmes utilisés dans les grands centres européens de formation.
Les bourreaux du jour s'appellent Timoumi et Abdeljelil. Le premier disqualifie certains et en retient d'autres alors que le second budgétise l'avenir. Pour Othman Benabdeljelil, les moyens ne permettent pas de qualifier plus de 8 jeunes qui viendront passer au moins trois semaines à Casablanca pour la formation et, qui sait, resteront jusqu'à la grande finale du 24 septembre prochain. Les billets d'avion, l'hébergement… ça creuse un trou dans les finances. Pour Timoumi, c'est la passion du foot et toute une carrière qui l'interpellent. Si ça ne tenait qu'à lui, il qualifierait au moins le double. Meilleurs amis du monde, ils s'évitent du regard à mesure que la fin de la journée (donc les résultats finaux) approche. Ramzi, lui, retrouve un second souffle. Il est de plus en plus pointilleux sur la disposition des caméras, il console ceux qui savent d'avance qu'ils n'iront pas à Casablanca. Il encourage les autres à y croire et il se fait des amis parmi les parents. Grand sentimental, il n'a apparemment pas envie d'être pris en tenaille entre le budget et le foot. A la fin de la journée, Timoumi fait parvenir un message à Othman : « J'en veux au moins 10 et pas 8 ». Quelques minutes plus tard, une réponse lui parvient, toujours par le même canal : « On avait dit 8. Tu n'en auras que 9 ».
C'est aussi cela Al Qadam Addahabi. Des malheurs, du bonheur, de la passion, des sacrifices, des déchirements, des chagrins, de l'espoir… Mais ô combien immense fut l'aventure !
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